Demain cela fera une semaine que nous sommes « confinés ». Avant, nous utilisions parfois ce mot pour décrire nos trajets dans les transports Parisiens ou dans les bars le samedi soir. Le mot « confiné » vient de prendre un sens nouveau. Pour la majorité d’entre nous, nous découvrons l’enfermement involontaire. Nous découvrons la privation de liberté de mouvements. Nous découvrons un univers réduit pour certains à quatre murs. Il en faut de inventivité pour faire de ces quatre murs un nouveau bastion de liberté.
Samedi j’ai décidé de faire un petit peu de sport. La verticalité ayant laissé place à l’horizontalité, les muscles s’atrophient gentiment. J’ai installé mon tapis au sol, lancé un cours de 20 min d’abdo-fessiers sur Youtube, et roulez jeunesse. Autrefois, avant le confinement, j’allais à la salle de sport trois fois par semaine. Dimanche, je me suis réveillée les membres en feu. Pour 20 minutes de sport ? L’heure est grave ! Mes jambes sont-elles en train de perdre leurs muscles ? Ces voyages du lit au canapé auront-ils raison des muscles qui autrefois me portèrent de la Thaïlande à l’Indonésie en passant par la Birmanie ? Je n’ai jamais été une grande sportive mais …
Mais la vie a changé depuis 7 jours. Nous sortons pour faire les courses tous les quatre jours environ. Nous passons beaucoup de temps sur le canapé, dans le lit aussi. On prend un temps infini à décider. On se paie même le luxe de ne pas décider parfois. Le temps n’a plus la même courbe. Il ne passe plus, il n’est plus linéaire, il s’étire sans début ni fin. Parfois il accélère « Il est déjà 20h ? Mais c’est l’heure de manger ! ». Nous ne regardons plus l’heure comme avant. L’heure n’est plus un impératif. Elle ne nous impose plus une séance de cinéma, une réunion amicale, un concert ou une visite d’exposition. Il n’y a plus de risque d’être en retard. Penser à l’avenir, si flou, si imprécis, s’avère trop déroutant. Penser au passé, pas vraiment utile. Je me réfugie dans le moment présent avec tout le réconfort qu’il procure. Il n’y a qu’un moment, un seul, et je suis en train de le vivre.
Je pousse un peu. Nous avons programmé un apéro-vidéo avec des amis samedi soir, histoire de se recréer l’illusion d’une vie normale. Nous avons renoué l’espace d’un instant avec l’heure sociale. Une heure sociale autour d’un houmous-aux-tomates-séchées maison et d’une bière, pour que le mental ne fuit pas totalement, qu’il reste accroché dans sa matérialité.
Je suis très fière d’ailleurs de mon mental. Il accepte la situation comme un courageux petit soldat. Avant l’annonce, c’était un cheval sauvage au bout d’un lasso. « Comment ça on va rester enfermés pendant on ne sait pas combien de temps? ». Le mental n’aime pas les lignes floues. C’est l’inconfort total pour lui. Mais il s’y habitude. Je crois même qu’il y trouve un désormais un certain repos. Il n’y a plus à courir partout. Il n’y a plus à prévoir incessamment. Il n’a plus qu’à se demander ce que l’on va manger, à se questionner sur quelques lignes directrices pour le travail, s’interroger sur ce que l’on va lire ou quelle séance de sport choisir.
Je médite quotidiennement pour rassurer ce mental agité qui se réveille parfois en sursaut et terriblement angoissé. Je le calme alors, comme une berceuse calme un enfant en proie aux cauchemars.
La temporalité a changé. Nous l’acceptons bravement.
Pour ceux et celles qui ne sont pas à l’hôpital, dans leurs champs, dans les supermarchés, dans nos rues ou les usines à nous assurer une belle qualité de confinement, comment appréhendez-vous ce temps ?
Gardons le cap !
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